Arzacq-Arraziguet, 27 mai 2011
Je me lève à quatre heures et demie et je range mon sac à dos au rez-de-chaussée afin de ne déranger personne. Je le fais à mon aise, car la présence des nuages retarde la venue de la clarté.
L'étape commence par une longue montée en ville.
Puis une franche descente me conduit au lac du Brousseau.
Ensuite le chemin est quasi plat jusqu'à Miramont-Sensacq.
Les champs de maïs défilent et le bitume aussi, c'est plutôt déprimant. Je pense à la Champagne.
Vraiment les mornes plaines ne me plaisent pas !
À dix heures et demie j'arrive à Miramont-Sensacq, un village adossé à une butte. Au sommet, à hauteur de l'église, je croise un enterrement.
Je fais le plein d'eau sur la place du village.
J'achète un morceau de tarte et un escargot aux raisins dans une boulangerie-pâtisserie et je les
mange sur place.
Mon repas intéresse un chien peu soigné.
Ici, dans le sud de la France, je vois souvent des chiens plus ou moins laissés à eux-mêmes. On semble leur témoigner moins de respect qu'en Belgique.
Et voilà un paysage du sud des Landes, non loin de Lapeyre.
La grande maison est la ferme de Gourgoussa.
La voie du Puy traverse brièvement les Landes après Aire-sur-l'Adour.
Je suis seul, et j'avoue que cela me plaît. Cela me rappelle mes étapes d'avant le Puy, j'en garde un bon souvenir.
Il y a des nuages, il ne fait pas trop chaud, le soleil tente de percer, je retire ma veste.
Le compagnon rapide de Patrick me rejoint. Nous parlons de l'enterrement à Miramont-Sensacq.
Il passe devant moi.
Je le revois entre Sensacq et Pimbo, il pique-nique à mi-côte.
Je le salue et je lui dis qu'après Pimbo, ce sont des descentes et des plats.
Une maison est accolée à l'église collégiale de Pimbo.
C'est le presbytère, une ancienne maison abbatiale. Cela donne une allure particulière à l'ensemble.
Peu après deux heures, j'arrive à Arzacq-Arraziguet, un petit village rural.
Le temps est chaud et lourd, orageux même.
Je me rends au gîte.
Le gérant du gîte me met dans une chambre de deux lits. L'autre lit est déjà occupé par un pèlerin, S.
Il semble frais et dispos.
Il me dit qu'il est parti ce matin d'Aire-sur-l'Adour.
À quelle vitesse marche-t-il ? Je suis parti qu'il faisait encore nuit, j'ai marché vite et je ne me
suis pas arrêté.
Ses chaussures sont impeccables et à côté d'un petit sac à dos normal, il a un volumineux sac à dos qui
doit peser pas loin de trente kilos. Étrange pèlerin qui fonce comme une fusée avec plus de trente
kilos sur le dos et arrive frais comme une rose !
En outre, ses chaussures semblent sortir du magasin. À supposer qu'il marche très vite, il aurait dû me
dépasser à un moment ou l'autre puisqu'il prétend avoir suivi le chemin. Ses sacs à dos sont aussi
impeccables que ses chaussures.
Je lui explique que je dois dormir avec un appareil respiratoire à cause de mes apnées.
Cela le fâche, il me dit qu'il a le sommeil très sensible et qu'il ne pourra jamais dormir si je mets
mon appareil en route.
Il va chez le gérant pour me faire changer de chambre.
Je suis sidéré, car c'est la première fois que j'ai une réaction pareille.
Il revient dépité. Soit il n'a pas trouvé le gérant soit il a eu une réponse négative. Mais il ne me
parle plus de mon appareil respiratoire et je décide de faire de même.
Un peu plus tard, il réclame parce que le séchoir à linge se trouve à cinq mètres de la sortie du dortoir. C'est la première fois de ma vie que je vois un marcheur réclamer parce qu'il doit faire cinq mètres pour aller pendre son linge !
Les trois mousquetaires arrivent au gîte. Je suis content de les revoir, mais je suis étonné parce
que je croyais que je ne les reverrais plus puisqu'ils m'avaient dit qu'ils progressaient par petites
étapes.
Ils m'avouent qu'ils prennent de petits raccourcis. En fait, ils coupent au court par la route chaque
fois que c'est possible. Cela réduit leur effort, mais ils perdent de beaux paysages et des petits
villages pittoresques.
Par contre ils s'entendent bien et ils s'amusent beaucoup ensemble. C'est un choix. Et c'est un bon choix
puisque cela leur procure de la joie !
Je perds deux imperdables, ce qui est une sorte de comble. Le compagnon rapide de Patrick me donne deux épingles de sûreté. Il se prénomme Alain. Nous éprouvons une certaine sympathie l'un pour l'autre.
J'achète de la nourriture, je paie le gîte. Je bois un demi-litre de lait, ce qui me fait du bien.
Je ne bois pas assez de lait.
Je me repose jusqu'au souper, prévu à sept heures. Il paraît qu'on nous a préparé une spécialité locale.
En fait, c'est une cuisse de canard avec des pâtes. Alors là, ce n'est plus de jeu ! Je suis sorti du
Gers, je suis dans les Pyrénées-Atlantiques, ce n'est pas juste !
Je dis cela pour rire, car c'est bon et je mange avec appétit.
Cela dit, si je vais au restaurant demain, je crois que je ne prendrai pas une cuisse de canard.
L'ambiance est animée. Je suis en face des trois mousquetaires qui sont en verve. Je m'amuse bien.
Mais je suis fatigué, j'ai beaucoup bu et je vais me coucher tôt.