Aumont-Aubrac, 4 mai 2011
Je déjeune à sept heures, bien avant tout le monde.
Je fais un petit tour dans le village.
Au-dessus du gîte, il y a d'importantes masses rocheuses.
La Roche-de-Lajo mérite bien son nom.
Je pars à huit heures. C'est tard, mais c'est avant tout le monde. La météo a
annoncé une journée chaude et je crains les chaleurs de l'après-midi.
Par ailleurs, l'altitude avoisine les mille deux cents mètres, le vent est frais et le ciel est
nuageux voire menaçant, mais il y a aussi du soleil.
Et surtout il ne pleut pas !
Peu après la Roche-de-Lajo, les rives du ruisseau de la Limagnole forment une large tourbière.
À la fin de la descente, en contrebas, se trouve le hameau du Rouget.
Vers dix heures j'arrive à Saint-Alban-sur-Limagnole.
C'est le Saint-Alban de François Tosquelles. J'ai préparé mon voyage sans faire le rapprochement
entre cette ville et celle qui a vu la naissance de la psychothérapie institutionnelle.
Je suis sidéré de ne pas y avoir pensé alors que j'ai consacré pas mal de temps au cours de mes études
de psychosociologie aux travaux de François Tosquelles, Félix Guattari, Jean Oury et Fernand
Deligny.
Cela me rappelle plein de souvenirs.
À la sortie de Saint-Alban, je m'assieds à une table de pique-nique. Elle est relativement sèche en dépit des pluies de la veille et de la nuit. Je me repose et je rédige mon carnet de bord.
Je reprends la route vers dix heures et demie.
Il y a deux montées, une après Saint-Alban et l'autre après les Estrets. La progression est aisée.
Je dépasse quelques marcheurs.
Aujourd'hui l'étape me semble être une promenade.
Je vois une hutte peu avant les Estrets.
Je plaisante en imaginant qu'il s'agit d'un refuge pour pèlerins.
En partant, je craignais de trouver des gîtes médiocres. En fait, tout est bien plus confortable que je ne l'imaginais.
Aux Estrets, je mange avec une pèlerine française que j'ai déjà rencontrée. Elle est simple et
sympathique. Nous parlons de choses et d'autres. Nous prenons notre temps.
Des marcheurs passent sur le chemin, non loin de nous.
Des Hollandais s'installent à la table de pique-nique voisine.
Parmi eux il y a le couple que j'ai suivi après le Sauvage. Nous échangeons quelques mots en
néerlandais et je traduis pour ma compagne française.
Ce cheval blanc couché, avec les Estrets en arrière-plan, trouve aussi qu'il fait doux et agréable.
C'est vraiment une belle journée de mai.
Le chemin entre les Estrets et Aumont-Aubrac n'est pas celui du miam-miam dodo de 2009. Le nouvel itinéraire est bon, avec moins de bitume que sur les chemins que j'ai parcourus depuis le Puy-en-Velay.
À Bigose, un panneau recommande de ne pas aller trop vite.
Je lève le pied, d'autant que les « vaches » veillent.
J'arrive à Aumont-Aubrac peu après deux heures et je trouve aisément le gîte. Dans ma chambre, il y a deux femmes, Céline et Floriane, et un homme, André. Le gîte est très bien. Le souper est à sept heures un quart et le petit déjeuner à partir de sept heures.
André m'offre un verre. Nous rencontrons deux pèlerins qui n'ont pas de logement et attendent le curé pour en trouver un. Ils nous offrent des verres. Nous bavardons.
L'un d'eux, Patrick, est un ancien gendarme. Il porte un énorme sac à dos de vingt-quatre kilos.
Une infirmière vient de lui soigner ses ampoules. Il croit qu'elles sont dues au bitume et non au poids
de son sac. Il a beaucoup marché en Corse et à la Réunion et il n'en a jamais eu des pareilles.
Le soir, au gîte, nous mangeons de l'aligot avec de la saucisse. Notre hôte fait la promotion de l'aligot. Il y a beaucoup d'ambiance. Nous chantons le chant des pèlerins.